«Savoir écouter d'abord», une entrevue avec Emmanuel Dubourg, député de viau et chargé de cours au Département des sciences comptables.
Un diplômé qui vise l’excellence
Emmanuel Dubourg présente un parcours impeccable. Diplômé du baccalauréat en sciences comptables en 1983, il a ensuite réussi les examens des trois ordres professionnels en comptabilité et obtenu son MBA en 2000. Homme engagé et généreux, il s’est mérité plusieurs honneurs. Lauréat du Mois de l’histoire de Noirs, des prix Innovation et excellence de Revenu Canada et CA Émérite (Comptable agréé). Il a aussi reçu la Médaille du gouverneur général du Canada ainsi qu’un Prix Performance du Réseau ESG UQAM en 2006 pour la qualité exceptionnelle de son enseignement. Leader au service de la communauté, il a une devise : « Viser l’excellence par la discipline et la persévérance ».
Selon M. Dubourg, le MBA a réellement élargi ses horizons. « Mon MBA a été un tournant important dans mon cheminement, une ouverture sur le monde qui m’a amené à accepter un premier mandat en Afrique. Moi qui étais plutôt casanier, cela a surpris mon entourage autant que moi-même. Mais, j’avais alors le goût de l’aventure et j’éprouvais une grande curiosité envers le continent et le peuple Africain ».
Enseignant dans l’âme
À la suite de son MBA, il part donc former un groupe d’inspecteurs du Mali pour un premier contrat d’une durée de trois mois. Cette première expérience internationale a été une véritable piqûre qui a donné lieu à un deuxième mandat, toujours au Mali, qui s’est échelonné sur plus d’un an cette fois, afin de former tous les inspecteurs en vérification fiscale. Outre le volet formation, le programme exigeait une transformation en profondeur pour améliorer les procédures de vérifications internes. En effet, ce projet impliquait un changement de culture et représentait un réel défi. Pendant son séjour là-bas, il a aussi enseigné dans le cadre d’un séminaire du MBA de l’ESG UQAM diffusé au Mali.
À la suite de son expérience en terre d’Afrique, Emmanuel Dubourg revient au Québec. Il s’implique dans plusieurs projets auprès de l’Ordre des CA, occupe plusieurs postes de gestion à la fonction publique fédérale et débute l’enseignement à l’École des sciences de la gestion en 2004. Il y donnait alors un cours particulièrement ardu, sans livre ou référence en la matière pour appuyer son enseignement. Grand pédagogue, il s’était mis en tête de vulgariser au maximum cette matière quelque peu indigeste.
« L’enseignement était pour moi un rêve que je convoitais et j’avoue m’y être pleinement investi ». De fait, il est fort apprécié par ses étudiants.
Concilier « valeurs » et « besoins »
Le saut en politique a été pour lui un choix déchirant. « Premièrement, je ne me destinais pas du tout pour une carrière en politique et deuxièmement parce que j’adore enseigner, j’éprouve ce besoin de communiquer, de transmettre des connaissances. D’ailleurs, je n’ai pas fait une croix sur l’enseignement ».
Emmanuel Dubourg est tout aussi passionné par son travail de député à l’Assemblée nationale du Québec, poste qu’il occupe depuis maintenant trois ans. « En étant à l’écoute, je sens que je peux faire une différence, que je peux livrer ce qu’on attend de moi. Ce qui m’intéresse avant tout, c’est d’aller chercher les individus pour mieux saisir leurs attentes en prenant soin également d’expliquer le contexte actuel, et ce, à chaque fois que l’occasion se présente ».
Ce qui le passionne dans l’enseignement, il le retrouve aussi en étant présent dans son quartier. Il est député de Viau, un des comtés les plus pauvres où les besoins sont criants. Mais, on y rencontre aussi une forte implication citoyenne et une grande diversité culturelle. « Tout en reconnaissant des problèmes liés à la pauvreté et des incivilités qui peuvent survenir dans le quartier, j’estime qu’il est important de valoriser l’implication des citoyens et de favoriser les actions et les projets susceptibles de les aider à vivre en harmonie ».
Ses talents de pédagogue, Emmanuel Dubourg les utilise aussi dans son rôle d’adjoint parlementaire au ministre des Finances lors du processus de consultation budgétaire qui précède l’annonce du budget. La situation difficile, tant sur le plan financier qu’économique, exige de pousser plus loin la réflexion lors des multiples rencontres avec les syndicats, les groupes de pression, les représentants du patronat, la FEUQ, les banques, le milieu culturel, etc. « Ce travail sur le terrain s’effectue de concert avec les différents acteurs et je les invite à identifier des solutions. Par la suite, je reviens auprès de mes collègues députés et membres du caucus pour expliquer les choix budgétaires ».
L’éducation, pour le salut d’Haïti
Emmanuel Dubourg, seul député d’origine haïtienne au Parlement, se dit très honoré de la marque de confiance du premier ministre Charest à son égard en le nommant responsable de la cellule de crise pour Haïti. « En tant que coordonnateur de l’opération, il était simple d’organiser les mesures pour régler assez rapidement des situations difficiles. Ainsi, le ministre de l’Immigration a ouvert l’accueil des immigrants à 3 000 individus dans le cadre du programme spécial de parrainage. Au 26 avril dernier, c’est 2 370 personnes (sur un objectif de 3 000) qui ont soumis une demande pour être ainsi accueillies au Québec. Nous sommes les seuls à s’être commis sur un si grand nombre. Plusieurs ministres ont mis en place des mesures concrètes d’aide dans cette phase d’urgence ».
De toute évidence, le contexte de la reconstruction est plus difficile que la phase d’urgence. Beaucoup de pays veulent être présents. La reconstruction d’Haïti représente plusieurs milliards de dollars pour les firmes privées qui souhaitent obtenir des mandats. Le Québec a certainement un rôle à jouer et peut compter sur la grande volonté de la diaspora haïtienne pour réaliser le travail colossal de reconstruction. Toutefois, cela ne devrait pas se faire uniquement au plan des infrastructures. Selon lui, « l’éducation est un enjeu majeur pour contrer le problème de l’analphabétisme qui sévit en Haïti. La mission de solidarité économique à laquelle j’ai participé nous a permis d’annoncer le 2 mai dernier que le Québec entend jouer un rôle en bonifiant son programme d’appui au renforcement de la gestion publique qui vise à former 300 cadres. Le comité ministériel sera saisi notamment des demandes visant la formation professionnelle et technique pour doter Haïti d’une main d’œuvre qualifiée pour les contrats à venir pour reconstruire le pays. »
M. Dubourg est membre du comité ministériel sur la reconstruction d’Haïti mis en place par le gouvernement du Québec et à ce titre, cette mission a été l’occasion pour lui de retourner pour la troisième fois en Haïti, la première étant en 2007 à la demande de la Banque mondiale et en 2008 à titre de membre de l’Assemblée parlementaire francophone., Paradoxalement, le 1 er mai plus exactement il s’est retrouvé en Haïti pour aider son pays d’origine, date à laquelle sa mère est décédée sept années auparavant. Il confie candidement : « Serais-je un peu superstitieux? J’ai la curieuse impression que mon saut dans la sphère politique, que je n’avais pas choisi au départ, est en fait une mission qui m’a été confiée : celle d’épauler entre autres, la diaspora haïtienne ».
Pour les Haïtiens d’ici et de son pays d’origine tout comme pour les Québécois, ce pédagogue passionné par les gens et fervent défenseur de l’éducation représente un modèle inspirant.
Entrevue réalisée par Evelyne Dubourg, responsable des communications, ESG UQAM
Note : L’auteure de l’article n’a aucun lien de parenté avec l’interviewé malgré le même nom de famille.
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